VOIE ANTERIEURE SUR TABLE ORTHOPEDIQUE
Cette voie d’abord a été introduite par Robert Judet en 1947 et dérive de la voie de Hueter. Elle a très régulièrement été utilisée depuis. Elle reste cependant peu utilisée. La voie postérieure est la voie royale d’abord de la hanche aujourd’hui.
Table orthopédique
L’utilisation d’une table orthopédique est nécessaire car cet outil facilite grandement le geste chirurgical, pour exposer au mieux le cotyle et le fémur. L’intervention peut être effectuée sans cette table mais, dans ce cas, il faut utiliser des écarteurs, lesquels sont beaucoup plus agressifs vis-à-vis de la peau et des muscles et l’assistance d’une ou deux autres personnes est nécessaire.
La table avec extension orthopédique doit permettre de mouvoir l’articulation de la hanche selon les plans de flexion-extension, d’abduction-adduction et selon l’axe de rotation.
Le patient est en décubitus dorsal avec un appui périnéal. Cet appui périnéal doit avoir un diamètre d’environ 10 à 12 cm et doit être, dans la mesure du possible, recouvert de gel afin de protéger le périnée, pour limiter le risque de compression nerveuse (nerf honteux interne) ou de nécrose cutanée (testicules, grandes lèvres). Le pied du côté opératoire est fixé dans un bottillon orthopédique puis une légère traction est appliquée sur le membre inférieur.
Incision cutanée
Elle est longitudinale, d’environ 7 à 10 cm. Elle est latéralisée d’un à 2 travers de doigt par rapport au bord externe de l’épine iliaque antéro-supérieure. Elle est oblique en bas et légèrement en dehors vers le milieu du condyle externe.
L’incision est généralement centrée sur une ligne verticale passant sur la partie supérieure du grand trochanter. La peau est incisée parallèlement à une ligne imaginaire joignant l’épine iliaque antéro supérieure à la tête du péroné. L’incision se situe à environ 2 centimètres en arrière de cette ligne
Abord intermusculaire
La gaine du tenseur du fascia lata est repérée. Cette gaine est incisée longitudinalement dans le sens des fibres du tenseur. Le chirurgien refoule le tenseur en dehors en le décollant de son aponévrose superficielle. Le clivage de cet espace fait apparaître l’aponévrose superficielle du muscle droit antérieur. Celle-ci est incisée longitudinalement. , le corps charnu est récliné en dedans et l’on met au jour le plan aponévrotique profond.
Cette aponévrose innominée qui va du cotyle au vaste externe est ouverte prudemment au bistouri, puis le pédicule circonflexe est ligaturé. Au début de la courbe d’apprentissage ou dans le cas d’un cotyle très dysplasique, il est utile de sectionner le tendon réfléchi du droit antérieur. Sous le droit antérieur, en général recouvert d’une fine aponévrose, le dernier plan musculaire avant la capsule est constitué du muscle psoas iliaque.
La capsule et son insertion inférieure juste au-dessus de l’insertion du vaste externe sont parfois difficilement visualiée. La localisation de l’insertion supérieure du muscle vaste externe est essentielle car elle correspond à deux structures anatomiques importantes : la capsule dont l’insertion inférieure antérieure est située au point d’insertion des fibres supérieures du vaste externe. En localisant ces fibres, on peut visualiser clairement la zone d’insertion de la capsule à détacher du fémur. Enfin, l’insertion supérieure latérale antérieure des fibres du vaste externe permet de trouver le tendon du petit fessier, si besoin est. La connaissance précise de l’endroit où les fibres du petit fessier sont insérées est importante car il y a un risque de lésion associée au détachement de la capsule.
1/ La capsulectomie antérieure puis totale peut être délibérément choisie par l’opérateur. Elle s’impose toutefois en cas de flessum pré opératoire, de raideur très importante et ancienne ou de correction d’un raccourcissement. Elle est conseillée en cas de gros épaississement inflammatoire. Qu’elle se fasse au bistouri classique ou électrique elle doit ménager une petite lèvre au bord antérieur du cotyle et un lambeau interne qui restera adhérent à la face profonde du muscle iliaque et le protégera. Cette capsulotomie et encore plus la capsulectomie oblige de SECTIONNER LE TENDON DU PYRAMIDAL, contrairement à ce qui est dit ou écrit à propos de cette voie. Le tendon du pyramidal ou piriformis s’insère sur la capsule antérieure, à la face porofnde du grand trochanter.
Une capsulotomie antérieure suivie de réparation capsulaire est tout à fait possible dans les autres cas. On choisira alors, pour la même raison, de faire un lambeau à charnière supérieure.
2/ La luxation de la tête fémorale se fait par rotation externe après avoir effectué une traction suffisante grâce à la table orthopédique pour insérer entre le cotyle et la tête fémorale une cuillère de Lambotte. Une fois la cuillère insérée entre tête et cotyle, il est impératif de relâcher la traction et d’effectuer la rotation en exerçant les forces de rotation au niveau du genou par l’infirmière qui empoigne ce genou sous les champs opératoires. Le chirurgien aide à la luxation en faisant levier sur la tête fémorale par la cuillère de Lambotte.
Section du col fémoral
L’aide maintient l’écarteur dans cette position, puis le chirurgien place la deuxième branche de l’écarteur sur le lambeau capsulaire latéral et le fixe en exerçant une forte pression sur le cadre de Charnley. Les deux valves de l’écarteur sont tranchantes et doivent être placées uniquement sur la capsule. Si l’écarteur glisse et touche le muscle, il peut endommager ces structures anatomiques délicates.
Avant de couper le col à la scie oscillante, la position du membre inférieur doit être vérifiée en palpant la rotule. Il est conseillé de mettre une légère traction dans l’axe du membre inférieur.
Une fois sectionnés à la scie oscillante à la jonction cervicotrochantérienne, la tête et le col peuvent être extirpés à l’aide d’un tire-fond. Il est recommandé de mettre 45° de rotation externe au niveau du pied avant de passer le tire fond dans l’axe du col. Dans presque tous les cas, avant l’extraction de la tête fémorale, on doit sectionner au bistouri électrique la capsule postérieure qui reste attachée au bord postérieur et inférieur du col fémoral. Si le ligament rond est toujours présent et maintient la tête en place, il est possible de faire tourner la tête fémorale sur elle-même afin de le rompre.
Une fois la tête enlevée, il est possible de placer un écarteur modifié de Charnley sur la capsule. Cet écarteur de Charnley modifié a des griffes très agressives et doit être uniquement placé sur la capsule. La branche la plus longue de l’écarteur est placée à l’intérieur de la capsule médiale et doit être fermement ancrée dans ce solide tissu conjonctif pour ne pas glisser.
Préparation du cotyle
Le membre inférieur est déjà en rotation externe de 45° depuis l’extraction de la tête fémorale. On diminue la traction légèrement. Cette position détend le psoas iliaque.
Si l’écarteur de Charnley modifié est bien positionné, le sourcil acétabulaire est visible ou palpé sur toute sa circonférence. Si la paroi antérieure du cotyle reste difficile à visualiser, il est possible de mettre un écarteur de Homann coudé au pied de l’épine iliaque antéro-inférieure. L’ensemble du croissant articulaire doit être observé. Le bourrelet et le ligament rond sont excisés, l’arrière-fond repéré. Le ligament transverse de l’acétabulum n’a pas besoin d’être sectionné.
Le fraisage peut être initié. Le fraisage doit respecter l’os sous-chondral. Une fois le cotyle préparé, les cornes respectées et avivées, un cotyle d’essai est mis en place, tout en sachant que par cette voie d’abord, il faut veiller à ni verticaliser ni trop antéverser l’implant. Le cotyle définitif est impacté et soumis à une manœuvre d’arrachement. L’insert acétabulaire en céramique ou en polyéthylène est mis en place.
Préparation fémorale
facilite la rotation externe du fémur qui doit facilement atteindre 90°.
L’extension de table doit être réglée. Dans un premier temps, il faut mettre de la traction pour faire passer le bord postérieur du grand trochanter en avant du cotyle. En effet dans certain cas, le grand trochanter est très saillant au niveau de sa face postérieure et lors de la mise en rotation externe, il peut se bloquer sous le cotyle rendant l’extériorisation du fémur impossible. On peut alors appliquer prudemment une rotation en manipulant le genou pour obtenir 90° en rotation externe au niveau des condyles de l’extrémité inférieure du fémur. Le chirurgien doit toujours initier la manœuvre en manipulant le genou. La panseuse suit en manipulant la table orthopédique. Dès lors, il est possible de placer un écarteur de Homann sur le sommet du grand trochanter entre l’insertion du petit fessier et du moyen fessier. Cet écarteur de Homann est très utile parce qu’il protège à la fois la peau et le muscle tenseur du fascia lata de l’agressivité des râpes fémorales. Il faut ensuite déverrouiller toute traction afin de ne pas étirer le nerf crural, et descendre le bras de cette table vers le sol et sous le membre inférieur controlatéral en adduction. Dès lors, le plan de section du col fémoral est horizontalisé.
Le premier temps de la préparation fémorale comporte l’ouverture du canal médullaire à l’aide d’une râpe starter arciforme et/ou d’une curette.
La préparation du grand trochanter est primordiale si l’on ne veut pas mettre la tige en varus. Les prothèses modernes comportent souvent un grand épaulement et, pour éviter tout conflit avec le grand trochanter, il est préférable de réaliser cette résection à la curette ou à la pince gouge.
À ce stade, les râpes adaptées à l’implant choisi sont descendues de proche en proche. Là encore, nous suggérons l’utilisation d’un manche arciforme spécifiquement développé pour cette voie, afin d’éviter tout conflit avec le tenseur du fascia lata. Chaque râpe doit être descendue au maximum afin d’affleurer le plan de section fémorale.
Cette préparation est considérée comme terminée lorsque la dernière râpe introduite est parfaitement stable en rotation et atteint le niveau prévu sur le schéma préopératoire
. Une fois la tige mise en place, une tête fémorale est choisie. On peut aussi comparer la tige définitive avec ce que l’on a retiré de tête fémorale et de col du fémur.
Réduction
Elle s’effectue en ramenant le membre inférieur à l’horizontal tout en appliquant sur ce dernier une traction axiale. En dernier lieu, une rotation interne douce est associée à la manœuvre habituelle de poussoir sur la tête prothétique. Après la réduction, la traction doit être relâchée, la rotule placée au zénith et la version du système prothétique analysée. Si la hanche est stable en extension à 90°, le risque de luxation post opératoire est quasiment inexistant.
Fermeture
La fermeture est précédée d’une hémostase soigneuse. Après lavage abondant, un drain de Redon est mis en place pendant un ou deux jours. Cette fermeture s’effectue en quatre plans comportant la capsule, une suture de l’aponévrose du tenseur du fascia lata, un plan sous-cutané et un plan cutané.